Evocations et rêves | créations d'après illustrations Forum dédié à l'univers visuel de Dragons

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Edzart
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Evocations et rêves | créations d'après illustrations

par Edzart » 20 mars 2017, 17:10

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Nous passerons par le bois, ce sera plus court.

Ces mots, j'aurais aimé ne jamais les entendre. Le bois de Telecse traversait certes la baronnie de part en part et il était bien plus rapide à vol d'oiseau, de la traverser. Qui ignorait, cependant, qu'ils étaient hantés ? Qu'en ces lieux plus d'âmes avaient été perdues que durant le massacre d'Hexwerb ?

Ces mots, ils avaient étés prononcés par le capitaine de mon équipe, qui cherchait à répondre à l'appel du haut commandeur Sempton. Je serrai ma lance contre moi, tremblant dans cette forêt sombre et humide, alors que chaque petit craquement, piaillement, chaque insecte qui me frôlait, chaque feuille qui bruissait, me faisaient sursauter. Dans mon esprit divaguant sous la pression de la fatigue et peut-être les dangers de la fièvre, je revoyais les images incompréhensibles. Qu'était-il arrivé ? On m'avait demandé de prendre le tour de garde. Assis dans l'herbe au pied d'un arbre, je sentais la fraicheur de l'humidité remonter dans les braies fines que je portais. Quand le soleil fut bas sur l'horizon, je me relevai et repartais vers le camp. J'étais fatigué et je n'avais pas fait attention aux différentes traces que je pouvais voir sur le parterre de fleurs que nous avions nous-mêmes écrasées.

Arrivé au camp, c'était le silence tenace, presque palpable, visible, qui me heurta. Cette absence de bruit rampait vers moi comme une présence délirante qui soulevait chacun des poils de ma peau, entrainant un tremblement incoercible. Où étaient-t-ils ?
M’arrêtant au milieu de la petite clairière, je regardais autour de moi. J’étais seul. Absolument seul. Les oiseaux eux-mêmes avaient disparus. Je ne comprenais pas. Rien. Je n’avais rien entendu, rien vu, durant ma garde. S’ils étaient partis… Un crac. Je me tournai dans tous les sens. Rien. Un souffle, sur ma nuque. Ça ne pouvait être le vent. Une brise chaude. Mes poils se redressèrent sur mes épaules, dans mon dos.

Ne réfléchissant pas plus d’une seconde, je prenais mes jambes à mon cou. Je courrai. Je ne m’arrêtai pas. Je courrai. Au-devant de moi, je pouvais voir des lumières verdâtres filtrer à travers le plafond feuillu de la forêt. Derrière moi… J’étais persuadé de les sentir. De les entendre. Les pas. Lourds et rapides. Lourds et proches. Je ne pus m’en empêcher, je hurlai. C’est alors que ce cri guttural, animal, s’extirpait de ma gorge douloureuse, que je trébuchais sur une racine avalant terre et herbe alors que mon visage glissait douloureusement sur le parterre de feuilles mortes. Ils approchaient. Toujours. Détournant de la boue mon regard ensanglanté, réussissant à me redresser à demi, je pouvais observer une chose que je n’avais jamais observé. Il était là. Devant moi. Déchirant son front proéminant et gigantesque, d’énormes cornes pointaient le ciel. Son torse déformé ne portait qu’un bras aux extrémités sales et crochues. Le second était rongé à sa base. Découpé. Sur son visage terrifiant, un œil me transperçait du regard. Le second n’était qu’une cavité vide. Noirâtre. Avec un sourire, le cornu leva vers moi un bâton noueux qu’il tenait fermement.

"En ces bois vous ne serez jamais tolérés.
Chaque pas en ces lieux est une insulte à mes yeux.
Prenez cette vie que j’aurais dû vous retirer
Et écrasez-vous devant la grandeur des cieux."


Il fit alors demi-tour. je le perdai rapidement de vue alors qu’il s’enfonçait dans les bois et les ombres. Dans la nuit et les arbres. Je me redressai doucement, difficilement. Je me relevai et repris ma course, jusqu’à ne plus pouvoir courir. Alors je marchai. Jusqu’à ne plus pouvoir marcher. Alors je rampai. Jusqu’à n’en plus pouvoir. J’avançais. Comme je pouvais. C’est alors que je l’ai vu. Il n’était pas loin de moi, à seulement quelques mètres. Un homme, barbu, vêtu de fourrures, qui m’observait à quelques distances. Il n’avança pas. Il attendit. Il attendit que je rampe jusqu’à lui et, là, m’aida à me relever. Avec des regards inquiets derrière lui, il me supporta, m’offrant son épaule, sans un mot.

Aujourd’hui, je vis ici. A Pontdefer. Loin des affres de la guerre et des horreurs cachées des bois de Sempton. J’écris ces quelques lignes alors que je suis au chaud, devant ce petit poêle que j’ai acheté le mois dernier pour passer l’hiver. Je travaille pour un marchand, portant, déplaçant et suant. Mais je suis libre et en vie. Je ne peux en dire autant des près de 30 âmes qui accompagnaient mon équipe. Chaque jour, je prie l’Aveugle pour qu’il épargne leur mémoire.


[spoiler]Je précise que bien évidemment, tout cela n'est en rien en lien avec Eana. L'univers dans lequel s'inscrivent ces quelques mots est un univers perso.
Je vais essayer de faire des retours comme celui-ci sur ce que m'inspirent les illustrations de Dragons pour mon univers. :)[/spoiler]
Dernière modification par Edzart le 20 mars 2017, 22:04, modifié 2 fois.
Aleksandr Novgarad - Mage de guerre - Lv4
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Iris
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Re: Illustrations : Univers

par Iris » 20 mars 2017, 17:19

Hey, Ed !

Un retour créatif comme ça mérite son propre sujet !

Je vais voir comment bouturer ! :D
Si je ne suis pas là, vous pouvez me trouver ici ou ou par MP.

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Nailseater
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Re: Evocations et rêves | créations d'après illustrations

par Nailseater » 20 mars 2017, 22:01

Très sympa ^^
Ça donnerai envie de s'y mettre aussi :)
Jasna Guerrière 1 Prêtresse 2
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Combat :
Attaque : +6 Dégâts : 1D8+4 + 1d6| 1D10 + 4 +1d6 C.A. 17
3 sorts mineurs
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Kaer Nunnos
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Re: Evocations et rêves | créations d'après illustrations

par Kaer Nunnos » 25 mars 2017, 22:40

La bannière du forum m'a donné envie de ressortir de mes cartons un petit texte, j'espère qu'il vous plaira !

La ruse de Ntngthd

Le silence régnait sur le cœur de la forêt de Stabre. Il en était ainsi depuis près de deux mille ans, depuis la venue du grand ver Ntngthd. A cette époque, Stabre était une ville florissante et prospère, le siège d’un royaume petit mais puissant. La lignée de ses rois se vantait de descendre des anciens dieux eux-mêmes, et ils affirmaient que nulle créature ne pouvait s’opposer à leur courage et à la force de leurs bras.

Pour preuve de leurs dires, ils exhibaient fièrement les dépouilles des Ogres, Trolls et mêmes Dragons que leurs ancêtres avaient occis durant leurs longs siècles de règnes. Le peuple de Stabre louait les jeunes dieux de leur avoir accordés de tels monarques. Et alors que le royaume fêtait son cinq centième anniversaire et que toute la population était en liesse, le prince héritier proclama que nulle créature maléfique n’oserait jamais attaquer le royaume entre la mer et les montagnes.

Ni le puissant Anthnit ni le dément Asvapad, n’oseraient jamais s’approcher des frontières du royaume, laissant leurs congénères plus faibles tenter leur chance. Quant au vieux Ntngthd, le plus vieux des grands vers, dont on ne savait plus rien depuis des siècles, si ce n’est que sa retraite du grand nord était toujours occupée, le prince affirma qu’il n’osait plus faire parler de lui, de crainte que les rois de Stabre ne viennent mettre fin à ses jours.

Jamais de telles insultes n’avaient été prononcées à l’encontre des trois plus grands dragons. Ailleurs qu’à Stabre, la populace aurait fui pour éviter le courroux des monstres cracheurs de feu. Même les vastes empires du couchant payaient tribu à Anthnit plutôt que de provoquer la plus bénigne de ses colères. Les guerriers des jungles du Sud, réputés pourtant pour leur bravoure suicidaire, préféraient se cacher dans des trous boueux durant des jours lorsque retentissaient les hurlements du ver fou Asvapad.

Ntngthd était lui tant craint que révéré par les peuples du Grand Nord. Ceux-ci l’apaisaient par des offrandes d’or et de viande régulières. Sans ces tribus, les peuples du Nord auraient pu régner sur Stabre et tous les petits royaumes du centre du monde. Mais l’appétit de Ntngthd pour l’or et les pierres précieuses était toujours aussi grand qu’au temps de sa jeunesse. L’âge lui avait cependant appris la patience, et donné une ruse profonde et sournoise.

Lorsqu’il entendit les insultes proférées à son endroit par le prince de Stabre, il dépêcha un de ses descendants auprès d’Anthnit, pour lui tenir ce langage :

« Ô Flamme de l’Ouest.
Je sais combien tu brules de te rendre à Starbe l’arrogante, pour la réduire en cendre, et entendre ses habitants vaniteux hurler en expiant leur orgueil dans une mort ardente.
Pourtant, Ô Brulure du Ciel, il te faut tempérer tes ardeurs, car ces Hommes ne sont rien, guère plus que des moutons trop longtemps gardés loin du danger.
Leurs bêlements t’insupportent, Ô Éclat de Soleil, mais je t’en conjure, replis tes ailes, retient ton souffle rougeoyant et ne te donne pas la peine de te déplacer pour châtier ces mécréants.
Car leur arrogance est ma responsabilité, et je ne pourrais supporter que tu puisses souffrir la perte d’une seule de tes écailles, Ô Glorieux Incendie. C’est pourquoi je vais me porter seul contre Starbe, pour la punir de son fol orgueil.
»

Pareils propos flattèrent Anthnit, et le grand ver se détourna de Starbe. Il avait de bien plus glorieux royaumes à bruler, de nombreux adversaires draconiques à vaincre et nombre de femelles à conquérir pour assurer sa descendance. Et ainsi la ruse de Ntngthd le priva d’un rival. L’ainé des Dragons quitta alors secrètement son antre, par de profondes galeries creusées par ses esclaves au fil des siècles. Il rampa pendant des semaines sous le sol froid et dur du Nord, avant de sortir enfin à l’air libre, aux frontières de Starbe.

Alors, le rusé bruleur de villes attendit. Il envoya ses esclaves lui ramener des bêtes sauvages, avant de les infecter de son venin. Il ordonna alors que les carcasses soient lestées de pierres et jetées dans toutes les sources des environs. Rapidement, la population de Starbe tomba malade, une étrange fièvre sapant sa force et sa vigueur. Alors que le peuple cherchait la source de cette étrange épidémie, les gardes-frontières du Sud lancèrent l’alerte : le Ver Fou fondait sur Starbe.

Alors le roi et les princes mobilisèrent leurs troupes et les portèrent au combat contre l’envahisseur ailé. Les esclaves de Ntngthd le pressèrent de passer lui aussi à l’assaut, mais le Dragon du Nord leur ordonna de faire silence.

« Je prendrais Starbe, soyez sans crainte. Et je le ferais sans perdre une seule écaille. Notez-le bien » dit-il.

Aussi les esclaves attendirent-ils auprès de leur maître. Du Sud vinrent des rumeurs d’effrois. Asvapad s’était jeté sur l’armée de Starbe sans se soucier de sa survie. Il avait brulé des régiments entiers, écrasés des héros et dévorés des couards en égales mesures. Mais même la démence du grand ver ne pouvait vaincre Starbe. Affaiblis et malades, ses défenseurs tinrent bon, et la souffrance parvint à percer le voile de folie couvrant l’esprit d’Asvapad.

Le Dragon repartit pour ses jungles du Sud, blessé et enragé, se préparant déjà aux combats contre ceux des siens qui voudraient profiter de sa faiblesse. Mais alors qu’il s’enfuyait, il rit car dans le sang des hommes de Starbe qu’il avait versé il avait senti le venin de Ntngthd. Que les habitants de ce royaume pathétique fêtent leur amère victoire, songea-t-il avec joie avant que la folie ne le consume à nouveau, qu’ils la fêtent avec gloire, leur destruction n’en serait que plus savoureuse.

Car amère, cette victoire l’était certainement. La moitié des armées de Starbe avait péri contre le grand Ver. Et le roi et tous les princes sauf un avaient eux aussi quittés ce monde. Seul restait le nouveau roi, le prince qui avait osé moquer les grands Dragons quelques mois auparavant. Pourtant, ce jeune monarque arrogant trouva les mots pour rasséréner son peuple. Au cœur de la nuit, quand tous étaient déjà épuisés par la boisson et leur étrange fièvre, il s’adressa ainsi à ses sujets :

« Braves Hommes de Starbe !
La souffrance et le deuil pèsent lourdement sur nôtre beau royaume ! Pourtant, nous avons en ce jour remportés une grande victoire. Le Ver Fou a fui, et les dragons du Sud, dans leur cupidité, se jetteront sur lui, affaibli qu’il est, pour le dévorer et prendre sa place ! Et voyez comme seul, il s’est porté contre nous. Où sont Ntngthd et Anthnit ? Ils restent terrés chez eux, craignant le courroux de Starbe !
Aussi, bon peuple, bois et chante, car en ce jour ce n’est point un, mais trois grands Dragons que nous avons vaincus ! Même la malheureuse épidémie qui sévit parmi nous n’a pu nous ravir la victoire !
»

« En es-tu si sûr, petit homme ? » demanda soudain une voix âgée et pourtant plus forte que le plus puissant des cors de guerre. « N’as-tu donc toujours pas appris à rabattre ton orgueil ? Peut-être voire bruler ton royaume fera-t-il l’affaire ? »

Alors Ntngthd cracha ses flammes sur le roi, les nobles et tous les habitants de Starbe. Ceux-ci périrent dans d’atroces souffrances, suppliants et quémandant une clémence qui n’avait jamais existé dans le cœur du vieux wyrm. Lorsque le soleil se leva, la capitale de Starbe n’était plus qu’une ruine silencieuse. Alors Ntngthd repartit glorieusement vers son antre, tenant entre ses griffes la couronne du dernier roi de Starbe.

Depuis ce temps, Asvapad continue à se débattre dans les méandres de sa folie. Les hommes du couchant tremblent toujours devant Anthnit. Les peuples du Nord paient toujours tribu à Ntngthd. Mais de Starbe l’orgueilleuse il ne demeure rien que le silence. Les hommes ont oubliés le glorieux royaume aux rois sages et puissants, capables de chasser le mal. Aujourd’hui, seule une sombre forêt recouvre le royaume, emplie de monstres et de sortilèges, fruit du venin de Ntngthd qui coule toujours dans les eaux de la région.
Et le cœur de la forêt de Starbe demeure aussi silencieux qu’au jour du départ du grand Ver, là où nul herbe ne pousse, et où seule la pluie lave les ruines de la capitale de Starbe, où pas même une écaille de Ntngthd ne fut arrachée.

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