par Etmer_Fachronies »
24 sept. 2017, 22:35
Dans les montagnes aux frontières de la Lothrienne, la végétation était rare. A ces hauteurs, les rares buissons épineux luttaient à mort pour gagner les lopins de terre propice à leur survie, et quelques touffes d’herbes éparses coloraient par endroits les vastes étendues rocailleuses. Le sol inégal était froid, et les restes des neiges épargnées par l’arrivée du printemps tachaient de blanc le paysage déjà trop bigarré.
Pourtant, malgré les contrastes qu’il recelait, le lieu sauvage offrait au voyageur l’étrange sensation d’une unité solide et hors du temps, à la fois belle et rude. Au loin, le soleil rougeoyant se couchait derrière les pics immaculés des Drakenbergen, et baignait d’une lumière crue ces étendues rocheuses ouvertes aux vents.
Un grand sourire sur la figure, le gobelin Bizut observait d’un œil ravi le paysage qui s’étalait devant lui. Décidément, mère Nature était d’une richesse sans fards, et elle se révélait prodigue pour celui qui souhaitait admirer ses trésors. En cette heure, un vent léger soufflait sur les hauteurs. Bizut réfléchit un instant, puis dû admettre qu’il ne se souvenait plus du nom de ce vent. Etait-ce la bise, les alizées ? L’aquilon ? Le zéphyr ? Maître Aleksander lui avait parlé des vents, une fois, mais l’apprenti ne les avait pas retenus sur le moment.
Il hésita encore, puis finit par hausser les épaules. Souriant de plus belle, il se rappela de ce que Grand-Chef Voukol lui avait demandé. S’installer ici, puis surveiller le retour du Maître et de ses compagnons, qui s’en étaient allés dans les entrailles de la Terre. Bizut grimaça. Il n’aimait guère l’idée de s’enterrer dans des terriers à lapins. Mais il savait que Maître Aleksander ne faisait rien sans raison, aussi l’idée devait être justifiée. Ayant trouvé un coin propice, à l’abri de quelques buissons, il installa son couchage et se glissa dans les couvertures avec un soupire d’aise.
Le regard braqué vers un horizon de plus en plus sombre, le petit gobelin réfléchissait. Grand-Chef lui avait demandé de rester vigilant. Oh oui, Bizut serait vigilant, oui oui oui. Bizut était toujours le plus sérieux du monde lorsqu’il était question du Maître et de la magie. D’ailleurs, Bizut avait hâte de montrer au Maître les progrès qu’il avait fait. La flamme avait jailli ! Certes, elle était petite, et sans l’aide du Grand-Chef il n’aurait jamais pu lire ce que le Maître avait inscrit sur son parchemin. Mais quand même. La flamme avait jailli. Bizut en était très fier.
Son gros gourdin calé sous les jambes, Bizut laissait son regard dériver sur ce qui l’entourait, silencieux comme jamais. Il fallait du silence pour être vigilant, oui oui oui. Et ainsi, il pouvait observer les prodiges de mère nature de plus près. Comme ce gros scarabée, par exemple. Les motifs bleus et noirs qui se mêlaient sur sa carapace dorsale étaient une splendeur, avec un tracé d’une géométrie parfaite. Et par les dieux, qu’est-ce qu’il était appétissant ! Bizut le saisit d’une main vive, et le croqua goulûment. Un régal.
Tout en mâchonnant, Bizut jeta un œil vers le ciel, où les premières étoiles commençaient à poindre sur la voûte céleste. Dans l’air froid et pur des montagnes, elles étaient innombrables. Le petit peau verte eut alors une idée. Allongé dans ses couvertures, il allait regarder les étoiles pour rester vigilant. Car mine de rien, ces étoiles étaient les vigiles les plus exemplaires du monde, à monter la garde toute la nuit sans jamais s’éteindre. Oui, c’était une excellent idée, oui oui oui. Bizut allait être le plus vigilant du monde ce soir, c’était chose certaine.
Un coup de pied dans les côtes réveilla Bizut en sursaut.
L’apprenti magicien se leva d’un trait, sidéré. Il faisait nuit noire, et le vent soufflait froid. Tant de temps avait passé ? Sa vigilance avait été trompée ? Impossible ! C’était… C’était le maître ! Maître Aleksander était de retour, et avec lui ses équipiers. Décidément, l’homme était bien d’une capacité hors norme, capable de tromper les sens aiguisés de Bizut. Le gobelin était fier d’être son apprenti.
- Maître Aleksander, vous êtes de retour ! Une joyeuse nouvelle, oui oui oui !
Puis Bizut distingua les marques. On voyait que le maître avait souffert. Ses habits étaient abimés, et des ecchymoses marbraient sa peau. Partout, de la poussière couvrait ses affaires, des marques de feu striaient ses manches et des trous perforaient ça et la sa tenue. Le peau verte jeta un œil rapide aux autres, qui n’étaient guère en meilleur état. A vrai dire, le maître était presque celui qui s’en tirait le mieux. La descente dans le grand terrier avait dû être rude.
Bizut reconnu plusieurs des peaux claires qui accompagnaient le maître. Il y avait toujours Grandes Cornes, Montagne Barbue et Epée Brillante, qu’il avait côtoyé ces derniers temps. Mais les autres, c’étaient un mystère. Il y avait deux peaux claires avec des grands cheveux, et un autre encore plus grand avec des dessins noirs et bleus sur les bras. Un autre avait une grande robe, comme Nashkema, et avec de grandes oreilles. Et…
Avant que Bizut ne puisse finir son inspection, un petit peau clair furibard engoncé dans une grosse armure métallique vint rudement l’apostropher.
- Et là et là, elle est où ma mule, et toi !!! Bon sang de bon soir, t'as vu ma mule ???
Le Maître vint vite s’interposer entre Bizut et Petit Furieux, mais le gobelin était perdu. Une histoire de mule ? De quoi donc le peau clair parlait ? Et pourquoi s’en prenait-il ainsi à Bizut ?
Puis le gobelin se rappela du campement du grand chef, et soudain tout fut clair dans sa tête. Alors que le Maître allait discuter avec Montagne Barbue, le peau verte se retrouva en face à face avec Petit Furieux. Le message était clair, c’était à lui de gérer le teigneux. Bizut se rappela de la manière dont il discutait avec ses congénère de tribu, planta son gourdin devant lui dans le sol d’une main et leva l’autre en l’air pour réclamer la parole.
- Que celui qui accompagne le Maître se calme, oui oui oui ! La mule va bien, Bizut ne l’a pas mangée. Ni le Grand Chef, d’ailleurs. C’est lui qui garde la mule, et il a envoyé Bizut quérir le groupe du Maître pour les ramener au camp.
Le gobelin indiqua une direction de son bâton dans le noir, sûr de son coup.
- C’est dans cette direction, oui oui oui. Il nous faut rentrer, car le Grand Chef attend au camp, et il avait hâte que nous tous rentrions.
Bizut se retourna alors vers Aleksander, des étoiles dans les yeux, et s’exclama d’un ton joyeux :
- Maître, vous avez trouvé ce que vous cherchiez en dessous ? Tout est bon ? Bizut devra vous montrer ses progrès, Bizut a sorti la Flamme ! Mais ce sera au camp. Vous êtes prêt à partir, oui ? Bizut va montrer le chemin, oui oui oui ! Il y en a bien pour une demi-heure de marche, à partir d’ici !
Les Aigles d'Arolavie : Yardan, adepte du Dieu-Dragon - Moine de niveau
6
CA
15 - PV
45/45 (6d8) - DV
6/6 (d8+2) - Points Ki
6/6 - Héroïsme
3/3 - Gourde
10/10