[Arolavie] Chapitre 1 - Garder la frontière Une aventure de la garde lunaire de Fort Ditelni à la frontière nord-ouest de l'Arolavie.

[Iris]

Ignir se précipitait et lançait ses dagues. Un moment il songea à s'abriter derrière une colonne, mais il prit conscience de l'effondrement qui était en cours. Le sol cédait par blocs, les murs se fissuraient dangereusement tandis que des pans de plafond tombaient.

Les événements accéléraient et devenaient confus.

Qui avait donné le coup de grâce ? Ignir avec ses dagues assassines ? Aleksandr avec son sort ? Ou bien Wulfstan muni de son arbalète et de sa marque du chasseur ? Aucun des trois n'aurait su clamer la victoire avec assurance, mais ils partageaient le soulagement de voir ce cauchemar se dissiper tandis qu'un escalier dérobé se révélait à eux.

Les trois hommes s'engagèrent sans attendre : leur vie, non leur âme en dépendait.

Avalant les volées de marches en colimaçon, ils se retrouvèrent bientôt essoufflés, mais saufs -- pour le moment -- dans la cour d'un château en ruine que reconnurent Wulfstan et Aleksandr. Le temps n'était pas aux explications et ils coururent vers la sortie, enfin l'entrée, où ils espéraient retrouver le rocher de Nashmeska, celui qui leur permettrait de quitter enfin ces lieux terrifiants. Le ciel autour d'eux avait l'aspect d'une colonne de nuages sombres et tempétueux. Le silence était absolu, et pourtant, au vu des dévastations, le bruit aurait dû être assourdissant.

Après l'arche de pierre, ils découvrirent Czepple, qui attendait toujours, seul, flegmatique, comme si rien ne pouvait le toucher.

"Enfin. J'ai bien cru un moment que vous échoueriez et je suis satisfait de m'être trompé."

Il fit un pas en direction d'Ignir, un sourire en coin tandis que son regard devenait noir d'encre. Sa stature leur parut de plus en plus grande alors même qu'il ne paraissait pas bouger.

" Nous nous reverrons, mon fils."

Et ce fut tout. "Czepple" disparut.

Il laissait un vide dérangeant, mais l'urgence commandait de partir. Enfin sur le rocher, et enfin celui-ci les tirait vers d'autres cieux.

...

Wulfstan, Aleksandr et Ignir ouvrirent les yeux dans la bicoque de Nashmeska, fabriquée par les gobelins. La guenaude ramassait ses affaires et si une telle créature pouvait ressentir de la fatigue, ce devait être le cas. Levko était là, en parfaite santé. Sa "mort" lui avait permis de rentrer plus tôt.

Nashmeska la guenaude quitta les lieux après un dernier sourire à l'adresse d'Aleksandr, laissant la manicle réunie. Par l'entrebâillement de la porte, on devinait des têtes de gobelins ricanants.

Spoiler

Vous êtes au max de vos pv, de vos sorts et vous avez regagné (enfin, techniquement, vous avez perdu) 1 niveau de fatigue. Les malades ne le sont plus.

[Pwyll]

Et dis moi, aurais-tu quelque chose à manger ? Nous avons fuit la mine, il y a ... euh ... en fait, je ne sais plus vraiment quand quelques jours ? Et si l'eau n'a pas manqué, ce n'est pas le cas de la nourriture. Même pas grand chose, ce sera mieux que rien.

L’œil valide de Gaspardin s'écarquilla subitement. Les plus observateurs pouvaient y déceler une surprise teintée d'horreur et qui laissa place à une subtile trace d'amusement qu'on pouvait lire à la commissure de ses lèvres.

Le halfelin rengaina prestement sa rapière, posa son bouclier contre le mur du bastion, défit son sac à dos et se mit à dénouer boucles et attaches avec l'assurance et la dextérité qu'offre l'habitude.

Dans l'ordre, il épousseta le sol, y installa une sorte de grande serviette à carreaux comme on le ferait pour un pique-nique, puis déposa dessus :

• - Un trio de saucisses fumées entourées d'un torchon, mais dont le fumet alléchant suffisait pour qu'on en devina le contenu,
  - une miche d'un pain sombre, à la mie épaisse et serrée et à la croûte encore assez croustillante, constellée de petits morceaux de noix concassées et de fruits séchés,
  - une généreuse tranche de la fameuse tome de Petit-Grandin, l'un des fromages les plus réputés des producteurs halfelins de la Cité Franche,
  - deux formes circulaires, emballées dans de grandes feuilles végétales avec des cordelettes de chanvre qui, une fois dénouées, révélèrent deux étranges tartes aux pommes qui semblaient renversées et luisaient d'une couleur acajou bien appétissante.

Gaspardin ponctua cette installation, qu'il compléta en y disposant plusieurs cuillères et couteaux, d'une explication qui se fit d'une voix cette fois plus naturelle et donc plutôt fluette et chantante :

"Ah, mais ça ! Il fallait le dire plus tôt. Ce n'est pas sain vous savez de jeûner de la sorte. Votre ventre gargouille, il se resserre, la peau se fripe, le blanc de l’œil jaunit, sans même parler du caractère qui s'enchafouine ! Ah non, non, ce n'est pas raisonnable. Vous me voyez bien désolé de n'avoir que si peu à vous offrir... Ah ! Si nous nous étions rencontrés il y a quelque mois de cela, vous auriez sans doute fait de bons clients pour mon commerce mobile... Enfin, c'était un autre temps..."

Ces derniers mots semblèrent emporter, pour quelques battement de cœur, le jeune Halfelin vers des souvenirs à la saveur douce-amère.

Alors que les aventuriers, affamés, prenaient sans doute place et tendaient leurs doigts vers les victuailles, Gaspardin les arrêta un instant en ajoutant :

"Attention, si vous avez de l'eau il faut d'abord se rincer les mains, c'est une bonne coutume vous savez, qui évite des maladies. Et puis une cuillère par personne. Et là, pas de pied sur la nappe ! Ce couteau là est pour le salé et l'autre pour le sucré. Puis, racontez-moi le mal qui séjourne ici et que nous allons dérouiller ensemble et lui faire regretter le jour de sa naissance, mais pas la bouche pleine, s'il vous plaît." conclut-il sur un sourire un peu crispé qui venait clairement souligner sa répulsion pour les mauvaises manières à table, et ce même sans table.

[Edzart]

J'emergeais de ce rêve comme on émerge d'une eau trouble et capricieuse. J'avais la sensation douloureuse d'être passé à un doigt de me noyer. Mes poumons me brûlaient comme s'ils s'étaient remplis d'un liquide épais. Je connaissais cette sensation. Je savais à quoi nous avions échappé de peu.

Encore étourdi par cette expérience intéressante, je répondis au sourire de Nashmeska avant de me relever et de me rendre immédiatement au "chevet" d'Ignir, pour m'assurer que sa situation allait en s'améliorant.

[Casaïr]

J'écoutais, dubitative, Jasna nous présenter tour à tour, soufflant une mèche de cheveux rebelle tombant sur mes yeux passant de ma sœur au halfelin. Cette rencontre était vraiment étrange ; les seuls êtres vivants -humains ou pas- croisés jusque là nous voulaient tous du mal, je ne pouvais donc m'empêcher de me méfier du nouveau venu et de ses étranges manières. Franchement, qui se souciait de se laver les mains alors qu'il se trouvait dans une ville naine désertée de ses habitants, remplacés depuis par des créatures au cœur aussi noir que cet endroit. Soupirant, je me pliais de mauvaise grâce aux désirs de notre "hôte", faisant la sourde oreille aux grondements inquiétant s'échappant de mon ventre affamé.

Une fois assise, je pris une tranche de pain et de fromage assorti d'un morceau de saucisse, mangeant par petites bouchées ce repas qui semblait presque divin après tant d'épreuves, plus pour ne pas m'étouffer en gobant tout rond que par soucis des convenances, avant de regarder... comment s'appelait-il déjà ? Gaspardin ?

"Qu'est-ce qui peut bien forcer un halfelin à quitter le confort de sa maison pour se retrouver ici, dans une ville fantôme ?"

Laissant le temps au Halfelin de répondre, je repris : "Nous nous sommes échappés du camp d'esclaves en surface. Ils creusent et cherchent cette cité naine, mais ils ne savent vraiment pas ce qui les y attend." Un regard vers ma sœur avant de poursuivre : "Les seuls personnes vivant encore ici sont des créatures du Chancre, et d'après un certain dieu, leur nid se trouverait dans son temple, plus ou moins au centre de la ville si j'ai bien compris. Et nous nous y rendions afin de le nettoyer."

Même si manger m'avait fait un bien fou, même si la rencontre avec cet olibrius était une distraction intéressante -tant qu'il semblait de notre côté en tout cas-, cela ne me ferait pas oublier tout de suite le ressentiment que j'avais envers Jasna.

[Soulnight]

Ignir tremblotait en se réveillant. La dernière phrase prononcé par Czep l'avait mis dans tout ses états... Non seulement sa mère, cette chienne démoniste le poursuivait. Mais sont père semblait le faire aussi. Un démon n'aide jamais personne sans attendre un retour, et le cout sera surement élevé.
Il réussi à ouvrir les yeux et vit Aleksandr penché sur lui. Ignir détourna le regard empli de tristesse, un de ses compagnon avait péri à cause de lui, encore... Des larmes lui coulait le long des joues.

[Pwyll]

"Qu'est-ce qui peut bien forcer un halfelin à quitter le confort de sa maison pour se retrouver ici, dans une ville fantôme ?"

Gaspardin soupesa la question quelques instants, se demandant s'il avait vraiment une réponse. Puis, au final, il se dit que l'humaine se fichait sans doute d'entendre la vérité, après tout, quoi de plus normal, ils venaient de se rencontrer et c'était une façon comme une autre de nouer le dialogue.

"Au départ, j'ai quitté la campagne de la région de la Cité Franche pour échapper au travail de paysan. Certains aiment ça, mais pas moi. Quant à ma présence en ces lieux et bien, disons que je suis content de vous entendre parler du Chancre et d'esclavagistes, cela prouve au moins que cette fois je ne me suis pas gouré d'endroit !"

À la façon dont le regard de ses interlocuteurs se rétrécissait, Gaspardin comprit qu'il n'était pas clair.

"Pour faire simple, je suis guidé dans la quête que j'ai fait mienne de pourchasser le mal où qu'il soit, mais mon guide est parfois facétieux. Ici, on dirait que je suis bien tombé."

"Les seuls personnes vivant encore ici sont des créatures du Chancre, et d'après un certain dieu, leur nid se trouverait dans son temple, plus ou moins au centre de la ville si j'ai bien compris. Et nous nous y rendions afin de le nettoyer."

"Parfait, maintenant que vous n'êtes plus affamés, passons à l'infamie ! La marche jusqu'à ce lieu d'ignominie vous servira de promenade digestive. Il ne faut pas traîner, Foudre Molle est une dure à cuire, mais je n'aime pas la livrer à elle-même, comme ça, dehors, avec ma charrette et tout. Sans parler de mes provisions qui viennent de prendre un sale coup dans les gencives..."

[Aeghiss]

Les paroles de celui qui semblait donc être un démon - et non pas Czepble - m'avaient ébranlées, d'ailleurs je l'étais déjà auparavant. J'émergeais de mon sommeil en sursaut.

Aleksandr. Nashmeshka. Ignir, sain et sauf. Et Levko. Bien vivant.
Ouf.

"Ignir. Levko. Tout va bien ?"

[Edzart]

Reculant d'un pas devant cette effusion soudaine, je regardais Ignir en levant un sourcil. Ne sachant pas exactement comment gérer ce genre de réactions, je levais une main et, tapotant l'épaule du démon sans grande conviction, je dis :
"C'est bon, calme toi. C'est inutile de pleurer. Levko va bien."
Reculant alors, je m'éloignai de lui pour le laisser voir le roublard, debout derrière moi.

[Soulnight]

Aleksandr ne savait pas comment s'y prendre, il lui tapota l'épaule...

"C'est bon, calme toi. C'est inutile de pleurer. Levko va bien."

La tristesse fit place à la surprise

"Diantre ! Mais, je l'ai vu mourir là bas..." silence "d'ailleurs c'était où, et pourquoi je me réveille ici ?"

[Edzart]

J'hésitais un instant. Devais-je lui dire ? Lui expliquer ? Quelles conséquences que la compréhension de ce que l'on est au fond de nous et de la définition de nos terreurs ? L’expérience serait, en revanche, très intéressante. Armé d'un sourire que je voulais conciliant, je commençai :
"Je sais que tout ça va être difficile à concevoir et à accepter, mais ce que tu as vécu était et réel et non. Nous avons voyagé à travers l'Astral. Cette dimension s'est modelée pour et par toi. Ce à quoi nous avons échappé de peu... Se nomme le chancre."
Je m'arrêtai une seconde, le regardai dans les yeux et continuai :
"Tu reviens de loin. Nous avons dû entrer dans ton esprit pour t'en délivrer. Pour ça, tu as dû affronter tes terreurs et d'une certaine façon... toi-même."
Je le regardai de haut en bas avant de terminer :
"Je ne suis pas sûr que tu aies gagné, cependant..."

Je m'éloignai alors, sans un mot de plus, avançant droit sur le nain :
"Et maintenant, chef ?"