[Arolavie] Chapitre 1 - Garder la frontière Une aventure de la garde lunaire de Fort Ditelni à la frontière nord-ouest de l'Arolavie.

[Edzart]

Terderic s'était jeté sur cette nourriture comme un rapace tombe sur sa proie. Il avait subtilisé ce qu'il pouvait et mordu à pleines dents, les larmes coulant sur ses joues alors que la viande glissait dans sa gorge. La douceur de cette pause nutritive fut pour lui un plus grand bonheur que le paradis sur terre. Après des mois de privation et de torture physique et psychologique, ce repas était une délivrance.

Maintenant qu'ils s'étaient remis en route, il écoutait les conversations, faisant de son mieux pour passer, comme à son habitude, complètement inaperçu.

Au cours d'un silence, il intervint pour demander au Halfelin nouveau venu :
"S'vous z'êt entré d'vot plein gré, v'd'vez s'voir où qu's'trouve la sortie, c'ben ça ? "

[Pwyll]

- N’avez-vous donc jamais entendu parler des Enseignements de Draaz, sir Gaspardin ? Si tel est le cas, je me ferais plaisir de vous les conter quand ceci sera plus à même de l’être.

Yardan... oh la boulette ! Heureusement que l'humain était de nature apparemment conciliante ou simplement mis de bonne humeur par le goût de la tarte tatin qui devait se faire rare du côté de son monastère paumé... Draaz serait donc un Dragon... euh, qu'avait-il dit déjà, un Dragon géant avec des roues et qui envoie des rayons ? Non pas des rayons, un sillon... Un Dragon agriculteur et avec des pieds aussi, puisque des gens marchent sur ses pas. Sur ses pas ou dedans ? Un tel dragon devait avoir de grands pieds et laisser de grosses traces.

À moins que ce soit un petit dragon, bien sûr. Difficile de savoir, sans jamais avoir vu de dragon de toute façon. Cette histoire de marcher sur ses pas, ça devait être une parole symbolique sans doute, parce que ça ne collait pas avec l'histoire des roues. Oui, un dragon avec des roues qui creusait un sillon. Mais pourquoi pas plusieurs sillons alors ? À moins qu'il n'utilise qu'une seule roue, comme une sorte d'équilibriste...

Prenant un air qu'il espérait inspiré, Gaspardin rendit à Yardan son regard profond. Gaspardin était assez doué pour donner le change et son visage sembla comme habité de pensées sages et subtiles.

"Heum, mes excuses Yardan et puis je ne suis nul sire vous savez, juste un modeste et infatigable pourchasseur du Mal. Pour votre Dieu, je pense que je vois mieux, en effet. Mais alors, il n'y a qu'une seule roue ? Comment Draaz assure-t-il l'équilibre du coup ? C'est intéressant tout ça. Peut-être que moi aussi je pourrais suivre votre Dragon, j'aimerais mieux comprendre à l'occasion."

Allez, en avant. Nous ferons plus ample connaissance dans la mêlée.

"Ah, voilà une approche qui me plaît ! Vous savez où nous allons ? À quelles créatures peut-on s'attendre ? J'ai vu des sortes de fleurs à becs au pied de l'escalier..."

"S'vous z'êt entré d'vot plein gré, v'd'vez s'voir où qu's'trouve la sortie, c'ben ça ? "

Gaspardin n'avait pas fait très attention au second homme du groupe jusqu'alors, notant seulement durant le frusque repas qu'il semblait privé de nourriture consistante depuis bien trop longtemps pour son bien-être.

"Euh... ah bah oui c'est par là" indiqua Gaspardin en pointant le doigt pour désigner le chemin pris pour arriver jusque là. "Mais au fait, vous étiez tous prisonniers ou quoi ? Qui est responsable de toute cette malfaisance ? Vous n'êtes pas des criminels au moins ? Enfin, vous semblez être des gens très biens, mais se retrouver ici, comme ça, sous le joug... enfin je sais bien que ça peut arriver de tomber au mauvais endroit au mauvais moment, même quand on a rien à se reprocher..."

L'humeur affirmée et colorée du Halfelin sembla se délaver, pour quelques instants, emportée par le flot intérieur de quelque sombre souvenir.

[Edzart]

Le temps ne file que pour ceux qui le poursuivent.

Laissant le nain s'occuper de gérer ce qui était rattrapage des souvenirs perdus du demi-démon, je m'éloignai et attrapai un bol pour me restaurer. J'en profitai pour demander à l'un de nos hôtes de fortune combien de temps nous avions passé assoupi et s'il pouvait m'apporter de quoi écrire.

Sur un petit parchemin, je commençai le récit concis de ce qui nous était arrivé et ce que nous avions réalisé. Qu'Ignir allait bien et que la manicle était en état.

J'accrochai le morceau de parchemin à la patte de Croac qui comprenait évidemment ce que cette manœuvre signifiait. S'envolant vers le camp de la garde, il chercherai Voukoll pour lui transmettre les informations.

Observant une fois de plus la rapière de Levko, je me dis que l'entrainement serait définitivement une bonne chose. Soupirant, je me relevai et fit quelques pas en attendant les instructions éclairées de maitre nain...

[Edzart]

Scrutant dans les ténèbres le chemin obscur que le halfelin lui avait indiqué, Terdéric ne répondit pas, attendant que les gardes lunaires s'expliquent. Après tout, lui ne se sentait même pas concerné. Ces quelques dettes de jeu qu'il avait contracté n'étaient que bien peu, pour se retrouver ainsi aux prises avec ce monstre d'antan, le chancre terrifiant.

[Iris]

Aleksandr apprit que seules quelques heures s'étaient déroulées. En fait, ils avaient juste dormi une nuit.

Au cœur du marais, tout était calme. Des gobelins abrutis, des amphibiens, des oiseaux d'eau, l'humidité...

[Aeghiss]

Le chef de manicle observa le manège du mage.

"Tu as envoyé un résumé de la situation à Voukoll, c'est ça ? Bonne initiative."
"Maintenant, on attend des nouvelles et des consignes de Voukoll quant à la marche à suivre."

Une pause.

"Il y a surement des nids chancreux dans le coin et ma hache me démange, mais il n'est pas question d'agir sur un coup de tête, et encore moins sans acquiescement de nos supérieurs... Par contre, il n'est pas question de rester oisifs... Pour l'instant, on va manger. Et si vous êtes tous en état, on sortira s'entraîner, ce que l'on fera tant qu'on n'aura pas de nouvelles consignes."

C'est alors que Faux-Jeton fit son entrée... Le nain se tourna en soupirant vers le gobelin hideux.

"Je suppose qu'il va bien falloir s'y faire... Vu qu'on est dans des marais pourris et qu'il n'y a rien d'autre à manger pour l'instant."

Un nouveau soupir.

"Bon... Je crois qu'une partie de chasse va s'imposer..."

[Edzart]

Regardant le nain quand il me demanda ce que je faisais, je levai un sourcil avant de répondre, un sourire sur les lèvres et la moquerie au fond de ma gorge :
"Pas du tout, j'envoie des nouvelles à ma grand-mère. Si chasse il doit y avoir, faites donc, ce sont là des compétences qui me dépassent."
Une nouvelle bouchée de ce ragoût qui je devais l'admettre, s'il n'était pas particulièrement goûteux, avait le mérite d'être nourrissant et original.

[Soulnight]

Le tieffelin affamé se jeta sur la nourriture, si le goût n'était pas au rendez-vous, cela contentait agréablement son estomac. Il se sentait revigoré à la sensation de chaleur qui lui descendait dans le gosier. Il écoutait attentivement tout ce qui se disait. Puis quand Alek se défila pour une partie de chasse, il intervint.

"Il me semble n'avoir rien dit sur ma petite discussion avec le bandit. Leur chef s’appelle le Banni et il recrute en masse tout les parias du coin. Ils ont l'air assez nombreux. Quand à savoir si ce sont des esclavagiste, j'en doute. Soit c'est un commerce rutilant du coin, soit ils sont aux ordre de quelqu'un"

Il se remit ensuite à manger, puis fit une légère pause

"Je me dégourdirait bien les gambille, une partie de chasse me scierais bien."

[Iris]

Les aventuriers intrépides étaient déterminés à libérer les ruines de la souillure du Chancre. Guidés par Jasna, ils arpentaient les grandes allées désertes à la lueur du solium, cet alliage qui éclairait la ville, et pouvait dégager une lumière dorée plus vive quand un lanceur de sort entrait en résonance avec lui.

Le coeur de la cité était constitué d'une haute colonne percée de pièces, couloirs et taillées d'escaliers, eux-mêmes reliés à d'autres lieux de la ville par des passerelles en acier.

Le temple était derrière, au croisement de deux avenues, son escalier monumental partant très précisément de l'angle droit qu'elles formaient. Il était large et flanqué de deux statues, l'une évoquant une guerrière sainte -- héroïne locale ? -- l'autre un sage forgeron couronné -- un roi fondateur ? --. Tous deux s'élevaient sur des piédestaux triangulaires. En haut de l'escalier, un parvis longeait la façade du temple sculptés de bas reliefs représentant des créatures angéliques et des azers luttant contre le Mal.

Un examen attentif révélait qu'il manquait des sculptures qui s'étaient détachées de la paroi. Leurs vestiges brisés se trouvaient sur le parvis, l'escalier et jusque dans la rue. Il apparaissait aussi que les grandes portes étaient ouvertes. Elles s'ouvraient sur l'intérieur, configuration qui permettait de s'enfermer facilement à l'intérieur, mais pouvait gêner a contrario une fuite depuis l'intérieur si jamais elles étaient closes.

Des traces d'activité chancreuse étaient apparentes : sortes de fils osseux, odeur douceâtre flottant dans l'air, substance indéterminée sur les portes...

[Casaïr]

Nous approchions à pas mesurés de notre destination, traversant la ville que nous pouvions enfin admirer dans toute sa splendeur. Je ne sais pas ce qu'en pensaient les autres, mais pour ma part je regardais tout autour de moi, incrédule devant un tel spectacle. Et bien qu'une partie de moi, plus mesquine que le reste, songea un instant que les nains devaient chercher à compenser leur petite taille en construisant des choses aussi monumentales, je ne pouvais qu'être admirative devant les talents d'architecte de ce peuple. Le solium nous permit d'avancer facilement dans les rues de la ville tout en économisant nos torches improvisées comme je l'espérais. Je vis également les traces du Chancre, déglutissant difficilement quant aux souvenirs qui resurgissaient.

En approchant du temple, je vis les portes ouvertes mais, de là où nous étions, il était impossible d'en discerner l'intérieur, ce qui était sans doute préférable pour moi et ma résolution toute neuve qui pourrait facilement s'effilocher à la vue d'un spectacle trop horrible pour être seulement contemplé. Je regardais ma sœur -plutôt son dos, en réalité-, et lui demandait, sans malice aucune :

"Et maintenant, Jasna ? On fait quoi ? On envoie Gaspardin en haut de l'escalier s'assurer de ce qui hante les lieux ?"