Chap. 20 - L'appel du corbeau - Jour 13 | vers 12h Une aventure de la garde lunaire de Fort Ditelni à la frontière nord-ouest de l'Arolavie.

[Pwyll]

Après avoir renvoyé Croac avec la réponse, préparé leur propre équipement et réuni les quelques éléments d'urgence qu'ils pensaient utiles aux réfugiés arolaves en situation critique, Levko et Gaspardin prirent la route à bon train.

Foudre Molle, la mule du Halfelin, portait des fontes, mais aussi son petit maître lui-même tant que Levko menait une marche forcée. Cela permettrait de ne pas ralentir l'allure à cause des courtes jambes du plus petit membre de l'improbable trio.

Les compères parlaient peu et se concentraient sur les lieues à avaler et les éventuelles patrouilles à éviter.

Leur détermination était presque effrayante.

A vrai dire, si les troupe Grovaedr avaient pu, en cet instant, lire les pensées des deux bretteurs, c'est un château déserté qui attendrait déjà les Gardes lunaires au moment de passer à l'action...

[Iris]

Le terrible trio avança prudemment, faisant parfois des haltes, dissimulés, pour échapper à la vigilance des patrouilles. L'ennemi avait des rapaces dressés, mieux valait ne pas l'inciter à chercher dans la direction où ils étaient.

Au cours de leur trajet, les choses faillirent vraiment mal tourner. Ils se rendirent compte que l'ennemi avait installé des sentinelles à un poste qui permettait d'embrasser du regard une bonne partie de la vallée. Pwyll et Gaspardin durent faire une longue halte, attendant la nuit suivante pour ne pas risquer d'être presque à coup sûr repérés en terrain découvert.

A la tombée de la nuit, ils se remirent en route un long moment.

Ils durent faire encore une halte. De là où ils étaient, dans les hauteurs, sous les conifères, ils voyaient la vallée, les lumières du village qu'ils n'avaient jamais approché. Avec les ombres nocturnes, ils ne percevaient pas bien le paysage, mais il leur apparaissaient, avec les lumières mouvantes, que des gens nombreux cherchaient quelque chose.

S'approcher du lieu de rendez-vous indiqué par Aleksandr revenait à traverser ce qui tenait de la fourmilière. Sans doute l'activité diminuerait dans la nuit, mais il y aurait des sentinelles, et les deux aventuriers ignoraient précisément où se rendre. Où donc était censé être le gué de la rivière... dont ils ne savaient pas précisément où elle se situait ?

[Atorgael]

Pendant que Levko se concentrait sur le chemin, Gaspardin du haut de sa monture observait les environs. Plus ils approchaient de leur lieu de destination, plus le danger serait grand de se faire repérer par des Lothriens.
Levko était heureux de se retrouver avec le paladin même s'ils se parlaient peu.

Le roublard avait pris cette habitude de se taire durant la période sombre de son adolescence, brimé et rabaissé en permanence par ses "parents adoptifs" il avait vite appris à garder le silence et à observer.

Il avançait à grands pas ne s'arrêtant que pour de courtes pauses, il avait déjà mené quelques marches de ce genre, généralement après un mauvais coup dans une ferme. Mettre de la distance entre lui et ses victimes vindicatives motivait grandement le chapardeur d'alors.

Aujourd'hui autre chose le motivait. Le sens du devoir et de la fraternité. Ses compagnons étaient coincés dans un territoire hostile, Jasna était prisonnière et les évadés n'étaient toujours pas rentrés chez eux.

En d'autres temps il aurait estimé que lui avait fait sa part du travail en ramenant son groupe, que Jasna n'avait que ce qu'elle méritait et il serait en train de siroter une bière à plumer quelques gogos aux dés.
Mais ce temps était passé. Il se devait à ses compagnons tout comme il savait qu'ils agiraient de même pour lui.

Alors qu'il était très jeune, Levko se rappelait que son père lui racontait des histoires de héros autrefois et que ses yeux du gamin s'arrondissaient à l'évocation des hauts faits d'arme. Mais à aucun moment il n'avait été question de héros obligés de dormir dehors dans le froid et l'humidité, à ne manger qu'une fois par jour quand tout allait bien, ni de se trainer dans des tunnels puants.
Par contre, tuer un Dragon, ça c'était un travail de héros, même si dans les histoires de son père ils ne s'en sortaient pas aussi fatigués ni blessés qu'il s'en était sorti.
Néanmoins, Levko se prit à se comparer à ce héros paternel parti délivrer ses compagnons.

Mais le tueur était toujours là et la froide détermination qu'il affichait par son mutisme laissait présager de sombres représailles pour qui se mettrait sur sa route.

Il avait même la bénédiction du capitaine.

[Atorgael]

Durant la pause imposée, Levko posa une question à Gaspardin, une question qui le taraudait depuis un moment. Ce petit moment de calme autour d'un repas froid lui en donna l'occasion.

" Dis moi Gasp', ton oeil tu l'as vraiment perdu ou c'est juste un truc. J'ai connu des types qui jouaient les borgnes et dont on s'méfiait pas. Jusqu'au moment où il tentait de te planter, les deux yeux grands ouverts. Si tu veux pas en parler, j'comprend hein. J'me posais juste la question. "

[Pwyll]

Gaspardin sourit, un peu tristement, à la question de Levko.

"Gasp, c'est marrant ça. Première fois qu'on m'appelle comme ça. Tu sais, mon petit Koko..."

Il tira la langue et reprit.

"Non, bon. Attends."

Il se tourna pour que la lune d'argent donne un peu de sa lueur sur son visage et souleva le cache qui masquait son orbite. Il y avait là une cicatrice, un œil fermé pour de bon, comme endormi à jamais. Une cicatrice de lame, pour un spécialiste comme Levko.

"C'est pas du chiqué. Un salopard de Gnome m'a planté un poignard dans l’œil. Un miracle que j'en sois sorti. Tu sais, ma jeunesse était loin d'être exemplaire avant ma rencontre avec... Elle. Celle qui m'a initié à la voie du paladin. D'ailleurs..."

Gaspardin sortit son amulette. Il pensait l'utiliser pour trouver Jasna, mais peut-être pourrait-elle les guider plusieurs fois ? Sa magie était très mystérieuse pour lui.

Levko pouvait distinguer un bijou ovale, un simple morceau de verre cerclé d'argent apparemment, mais on pouvait distinguer ce qui ressemblait à une mèche de cheveux, sous le verre ou fichée à l'intérieur.

Il chuchota, sur le ton révérencieux d'une prière :

"Alïndulé, comment rejoindre nos amis sans apporter sur eux le danger ? Guide-moi si j'en suis digne."

[Iris]

Spoiler

Bestiole dans le fond : https://www.youtube.com/watch?v=220O13BKFxg

Levko et Gaspardin voyaient les lumières être de moins en moins mobiles.

[Pwyll]

Il observait les sentinelles qui semblaient s'arrêter pour la nuit. Il faudrait naviguer entre elles, comme entre autant de phares mettant en garde un navire en perdition de ne pas approcher des haut-fonds. Il n'y connaissait rien en bateau, il ne faisait qu'utiliser une image à partir des trucs qu'il avait entendus par-ci par là, ça lui donnait l'impression de ne pas courir à la mort et d'être malin.

"J'crois qu'il est grand temps de se faufiler. Regarde, ils arrêtent de bouger. Ils vont faire un peu de boucan en installant leurs campements pour la nuit, c'est maintenant qu'ils seront moins vigilants, c'est comme un temps de pause pour eux !"

[Atorgael]

Levko acquiesça silencieusement.

" J'vais passer d'vant et vous ouvrir le passage si ça t'vas. "

Ce n'était pas la première fois que le voleur allait passer au nez et à la barbe d'une patrouille. Il espéra juste qu'il n'avait rien perdu de ses réflexes de maraudeur et que les soldats seraient trop occupés pour faire attention à eux.

Spoiler

Discrétion +7

[Iris]

Les deux experts allèrent aussi vite que possible et restèrent prudemment à distance des problèmes.

La route était longue, mais ils ne se laissèrent pas décourager.

Spoiler

Rendez-vous au chapitre 21 !