par Etmer_Fachronies »
28 août 2017, 10:54
Les formes bougeaient calmement. Des couleurs cascadaient, sereines, dans l’océan de l’éther infini. Des pastelles se mélangeaient aux ors luminescents, des rouges vifs flânaient auprès des bleus pâles, le tout dans une symbiose parfaite. Les paysages chatoyaient, et cela en grande harmonie.
Au milieu des flots iridescents, bercé par la caresse des essences, l’esprit de l’homme planait. Serein. En cet instant, il était là où il devait être. Autour de lui, le flot du monde s’écoulait, et il était bien.
Au milieu des formes mouvantes, l’ordre était revenu. La dissonance noire s’était évanouie, chassée. Et même si des traces persistaient, son cœur avait été rompu. L’homme savait cela bon, et il en était content. Pourtant, quelque chose d’autre attira son attention. Plus loin, une nouvelle forme se dessinait. Elle se terrait, tentait de se dissimuler, mais elle n'en était pas moins présente. Sa noirceur différait. Mais l'homme le savait, elle était tout aussi vile.
L’homme tenta de l’observer, de tendre son esprit vers cette singularité… mais sa concentration vacilla, et il se senti happé, aspiré hors de ce monde brillant.
Yardan ouvrit les yeux, assis en tailleur sur le sol de la Forge Sacrée. Autour de lui, ses compagnons dormaient encore du sommeil du juste. Il laissa ses yeux s’habituer de nouveau au monde réel, les sens encore charmés par sa transe nocturne. Il déplia ses jambes calmement, se releva d’un geste mesuré.
C’était étrange.
Après une nuit dans cette posture, il aurait dû se sentir endolori, les muscles crispés tant par l'immobilité que par les efforts de la veille. Il n’en était rien. Au contraire, il sentait une énergie nouvelle parcourir son corps, de sa tête à ses pieds. Sous sa peau, dans ses fibres musculaires, le long de ses os, son énergie vitale rayonnait, plus grande encore que la veille. Il était revigoré, régénéré. Ses tatouages bleutés, longtemps silencieux, semblaient s’animer d’une vie propre contre sa peau. Comme s’il se réveillait après un long sommeil réparateur, l’adepte se redécouvrait, et il appréciait cette sensation.
L’esprit plein de gratitude envers le Dieu-Dragon, Yardan sentait que quelque chose avait changé en lui. Etait-ce une récompense pour avoir su triompher du Serpent en ce lieu ? Il l’ignorait, mais le présent était là. Dans ses poumons, il sentait son souffle canalisé avec aisance, comme jamais auparavant. Oui, son corps sortait renforcé de cette Epreuve, et il se savait désormais plus vif, plus rapide. Certains mouvements appris lors de ses enseignements à Jishim Saadar lui apparaissaient sous un jour nouveau. Un sourire au visage, le moine brûlait de tester ses connaissances au feu de la prochaine Epreuve.
Puis il perçu autre chose. Une sensation indescriptible, comme une caresse, à la fois vorace et apaisante, furieuse et protectrice. Et cela provenait de ses mains. Ou plus exactement, de ce qui les couvrait. Il baissa les yeux sur les bandes de tissu bleu azur et or qui ceignaient ses poings. Les Liens du Commencement. Ces bandelettes si précieuses à ses yeux, qui lui avaient été remises après son épreuve d’ascension au rang d’adepte.
En cet instant, une force invisible semblait en émaner. Elles pulsaient, la fois douces pour leur porteur, et furieuses pour ses ennemis. Nul doute, un éclat de pouvoir s’y était niché après leur combat contre les apôtres de l’Immonde. C’était un cadeau inestimable, fruit de son effort et de sa dévotion envers Draaz. Ebranlé par le présent, le moine joint ses mains devant son front, et entama une prière silencieuse.
Puis il jeta un œil autour de lui. Ses compagnons semblaient dormir, pour la plupart. Yardan avisa Ludmilla, qui sommeillait paisiblement. Le moine sourit en songeant à son échange de la veille. Mais il n’avait toujours pas comprit sa réaction lorsqu’il l’avait massée et pensée à la suite de son échange avec Caliobé. La jeune femme était devenue rouge écarlate, puis avait semblé déçue lorsque le moine était allé s’allonger en quête d’un sommeil réparateur. Peut-être était-ce la cause de ses blessures ? Il l’ignorait. Une chose était cependant sûre, il espérait qu’elle allait guérir au plus vite.
Mais l’heure n’était pas aux projections arbitraires. Avec le réveil venait le temps du Premier Mouvement. Dans un silence respectueux pour ses compagnons assoupis, Yardan se retira dans un coin abrité de la salle et se lança dans son kata du réveil, sans bruit, le corps plus adroit que jamais dans ses passes martiales.
Quand les autres gardes se réveillèrent, il revint vers eux et écouta attentivement les échanges, hochant la tête aux suggestions de Jasna. Décidément, entendre la Parole de Forgeron avait été pour elle une bénédiction rare, car la jeune femme s’était transcendée depuis son Eveil. Il avait conscience de la portée de ses paroles, aussi n’ajouta-t-il guère de mot. Adepte d’une hiérarchie stricte, il jeta simplement un coup d’œil à Ludmilla, pour voir si celle-ci acquiesçait aux dires de sa sœur. L’ordonnante sembla interpréter correctement son regard, car elle acquiesça en retour. Pour autant, le moine n’aurait su dire à quoi le rouge sur ses pommettes était dû en cet instant.
Puis vint le discourt de Gaspardin, sur la foi et l’engagement. Yardan ignorait comment comprendre certaines parties de son discours, mais l’ensemble sonnait comme le Serment des Requérants prononcé par les Porteurs de la Parole. Paumes jointes, le moine fit un signe de tête au paladin. Puis il s’en fut vers les portes, ainsi que l’Epreuve de ce Jour semblait s’esquisser.
Le corps détendu, il écouta le Terdéric parler, et confirma d’une voix grave :
- Bel état d’esprit, hardiesse fait honneur à votre cœur. Les laquais du Chancre doivent être absous, car peste ne saurait être agréée. La Grande Roue puisse-t-elle tourner en notre faveur, car Draaz porte nos bras en ce lieu si sombre.
Puis, d’un coup d’œil à Gaspardin, il désigna ce qui cognait derrière les portes.
- La Balance ne saurait tolérer pareille injure sur le Tissu du Grand Tout. Soyons prêts à affronter l’horreur, car en l’action réside l’espoir.
Yardan se plaça alors comme indiqué vers le paladin, et attendit l’ouverture des portes, prêt à en découdre.
Les Aigles d'Arolavie : Yardan, adepte du Dieu-Dragon - Moine de niveau
6
CA
15 - PV
45/45 (6d8) - DV
6/6 (d8+2) - Points Ki
6/6 - Héroïsme
3/3 - Gourde
10/10