De nombreuses questions en susepend
Le printemps commençait à être vraiment perceptible dans les vallées des Drakenbergen. Le jeune homme sentait les odeurs de la terre et de l'air changer doucement tandis que les fleurs les plus précoces tapissaient les sous-bois.
Son voyage avait déjà duré plusieurs mois depuis le port d'Ellerina. Il avait quitté le monde qu'il connaissait pour un autre, lointain, barbare, sauvage, bruyant et dangereux. Mais il savait en son fort intérieur qu'il avait pris la bonne décision: attendre dans un refuge ne faisait que retarder l'inévitable. Voilà longtemps son peuple s'était retiré du continent du Cyfandir où il était apparu. Le départ avait eu lieu après la guerre de l'Aube, le conflit le plus épouvantable de l'histoire connue.
La guerre de l'Aube désignait la période durant laquelle la menace du Chancre était apparue pour la première fois. D'innombrables nids chancreux avait crû dans l'Inframonde, et avaient déversé leurs rejetons abjects à la surface : gricks, babéliens, ankhegs, hydres, et bien d'autres. Pour l'emporter, les héros d'antans avaient dû faire de lourds sacrifices. Les dernières batailles avaient été souterraines, et des contingents entiers d'elfes, de nains et de gnomes avaient disparu alors dans les ténèbres. Personne n'a jamais su l'issue des derniers combats.
... mais quelques décennies plus tard, on appris l'existence de nouveaux peuples qui fuyaient la lumières : les drows, les duergars et les Svirfnebelins...
Aujourd'hui encore ils demeurent entourés de mystères, tout autant que le Chancre le plus profondément enfoui. Il n'attaque pas Ellerina -- en tous cas, rien n'a été observé en ce sens -- et le Cyfandir est sa proie de prédilection. Les arcanistes savent qu'il y a un lien entre Chancre (abomination physique, cancer rampant) et le Cauchemar (une sorte d'équivalent dans le monde Astral). La nature de ce lien n'est pas claire.
Les Elenions ont un dégoût viscéral à l'égard du Chancre, de sa corruption et du Cauchemar -- la menace qui détruit les jeunes elfes qui n'arrivent pas à apprendre la transe.
Kuppresittar
Depuis le début de sa visite des Drakenbergen avec les caravanes naines, le jeune homme avait étudié les ruines et vestiges, consulté les archives qui étaient accessibles. Dans un premier temps, il cherchait à avoir une vision d'ensemble. Ce n'était pas facile ! On trouvait des traces de plusieurs époques :
- Les plus anciennes étaient celles des Voyageurs
- L'aube de l'humanité était aussi l'époque de l'âge d'or des Elfes, durant lequel la transe n'existait pas. Cette période heureuse s'acheva avec le désastre de la guerre de l'Aube et l'infamie de l'apparition des drows -- sujet tabou --
- D'assez loin dans le passé -- à l'époque des rois destinés -- il y avait les ruines boréales, avec quelque part, l'académie de magie de cet empire...
- Puis venait la période des nouveaux empires, avec notamment celui d'Haltepas, puis un éclatement du Cyfandir sous les coups de boutoir de la grande Horde de Tamerakh le conquérant -- le demi-orc qui devint dieu d'après la légende --
Les survivants d'une branche cadette du clan Kupfer étaient venus dans cette région du nord-est des Drakenbergen pour explorer des gisements. Le jeune elenion connaissait cette histoire pour l'avoir un peu étudiée. Il y avait parmi eux un archiviste qui avait travaillé sur les batailles de la guerre de l'Aube. Malheureusement, ses travaux n'avaient pas été copiés -- ou insuffisamment -- et avaient disparu avec sa colonie de Kuppersittar.
Une ruine de carrefour
Dans la vallée se trouvait une modeste ruine. Borne milliaire avec une allure de menhir, vieilles gravures érodées, des marches ne menant plus nulle part...
En posant une grande feuille fine et légèrement humide sur les pierres gravées et en tamponnant avec de la peinture noire au dos, très légèrement, il parvint à faire apparaître en négatif le texte.
...
Tandis qu'il s'affairait une grive voletait non loin.
Il savait qu'une jeune femme, une melessë -- une demi-elfe du sang de son peuple -- se trouvait non loin. Elle grimpait aux arbres en utilisant de la magie. Et s'était donnée beaucoup de mal pour scier une branche... qu'elle traînait derrière elle désormais. Ses excentricité mises à part, elle était d'une beauté étourdissante -- vaguement dérangeante même.
...
Que disait le texte ?
Ah oui, Kuppersittar n'était pas loin... mais au vu de l'état des reliefs, un effondrement de terrain avait eu lieu il y a ... un certain temps... et avait dû condamner la voie d'accès terrestre "classique".