par Edzart »
10 oct. 2016, 18:23
Jour ?+1 Heure : Environ 16h.
Je n’en peux plus. Nous avons fait une halte à l’instant, nous repartirons dans quelques minutes. Mes jambes sont lourdes, mes pieds en feu. Les chevaux ne sont d’aucune utilité dans ces marais abominables et je suis avec peine les enjambées infernales du sergent. Soit il veut me tuer, soit il est bien plus pressé que ce que j’avais imaginé. Nous avons traversé les marais à la suite de ces créatures ni mortes, ni vivantes, luminescentes dans la matinée fraîche. Inquiet, je faisais attention à chaque pas, chaque instant. Les marais sont traîtres et je me voyais déjà disparaître dans ces étendues sombres et glauques. Où allons-nous, suivant cette créature lumineuse et, dans mon esprit, si affreuse ? Sait-il, Voukoll, que nous suivons certainement l’âme d’un mort-né ? Et s’il veut jouer ? Et s’il veut s’amuser et dans les marais nous noyer, nous faire disparaître ? Je sais à peine nager. Comment je m’en sortirais ? Poser le pieds dans cette vase et c’est la fin. Il faut que je me calme. Que je respire.
Voilà quelques heures que nous sommes finalement arrivés. Je suis bien en vie. Au bout du compte, la boule de lueur a décidé qu’il serait encore bien plus amusant de nous amener à destination. Pour quelle raison ? Vous allez bien vite le comprendre. Nous avons étés accueillis par le plus insolite des comités. Constitué d'affreux gobelins, il était puant, bruyant et laid. Autant dire que pour un comité d'accueil, j'avais déjà vu mieux. L'un d'entre eux, je ne sais pourquoi, ne cessait de s'approcher de moi et de me souffler dans le visage. Quelle haleine. Siffleur, l’appelaient d’autres de ces pitoyables créatures verdâtres. Voukol me prit par l’épaule, et à part, murmura d’un air entendu : “Pas un mot avant que je ne t’y autorise, c’est clair ?”
Nous fûmes introduits alors à une personne d’une toute autre stature. Au premier regard, je sentis l’émanation douce et agréable des effluves de magie qui de cette personne, se dégageaient. Quelle beauté élégante en cette posture, en cette puissance qui m’enveloppait. Le quidam moyen n’aurait sans aucun doute vu en cette sublime créature que l’immonde visage déformé, les membres trop longs et ses yeux monstrueux. Moi, j’y vois un miroir de ce que je suis, miroir de l’immondice perlée de pouvoir et de la beauté de la magie. A dire vrai, je ne pensais pas un jour tomber sous le charme de qui que ce soit, et me voilà enchanté par l'indicible beauté de cette sensuelle Guenaude. Je vais ici essayer de retranscrire notre discussion, une fois que les gobelins aux noms improbables nous eurent amenés jusqu’à un petit patio joliment arrangé, aux airs de petite enclave de verdures dans ce marais puant. Ils avaient des noms impensables, sortis tout droit de l’imagination d’un conteur fatigué, des choses comme Mesquin, Rikiki et Grincheux. Celui qui se faisait apparemment appeler Gringalet devait avoir quelque chose contre moi, car à chaque instant, je le trouvais en train de me cracher dans le dos. Saloperie de peau verte. Quoi qu’il en soit, ces imbéciles se tinrent à carreau une fois la belle dame de maison en notre présence. En face de moi, installé de l’autre côté d’une table de pierre ancienne, Voukoll tirait, encore une fois, une tête de six pieds de long. Quelque chose, cependant, était étrangement différent. Comme s’il craignait quelque chose en plus de la haïr. Nouveau.
“Que puis-je pour toi, mon très cher Voukoll ? Ca fait bien longtemps que tu n’étais pas venu me voir…”
Cette voix mielleuse, ce sourire. Le miens s’étira tandis que je laissais les deux… quoi ? Amis ? Non. Ennemis ? Non plus. Je ne sais pas ce qu’ils sont, mais cette sensation d’animosité amicale me fascinait. Ils discutèrent un moment, échangeant des banalités étranges sur ce que pouvait ou non, la guenaude… Quoi ? Avoir ? Oui, apparemment. J’étais sans arrêt déconcentré par cette imbécile de créature verdâtre qui me soufflait son air pestilentiel dans le nez. Qu’est-ce qui lui prenait ? L’imbécile à côté de lui, riait et tapait dans ses mains en disant “Allez siffleur !” Crétins. Que pouvait-elle m’apprendre ? Elle semble avoir tant de magie, tant de pouvoirs. Je suis certain que ces sortilèges sur lesquels je travaille depuis des mois maintenant, seront en quelques instants résolus, avec son aide. Je ne suivais que d’une oreille distraite la discussion entre Voukoll et celle qui se faisait appeler Vesheska, jusqu’à ce que mon nom semble apparaître comme par magie dans la conversation.
“Et celui-là, je peux l’avoir ?”
Que… Quoi ? Moi ? Comment ça m’avoir ?
“Non. Il est arolavien. Tu connais notre accord. Jamais un arolavien.
- Rah Voukol… Une exception…
- Non.
- M’avoir pour quoi ? Ne puis-je m’empêcher de demander.
- Mais pour passer du temps avec moi, mon bichon… Pour… partager.”
Partager ? Partager ! Oui ! Enfin. Le savoir. Peut-être serait-il possible d’avec elle, partager les formules, les mots de pouvoir. J’allais pouvoir apprendre.
- Avec plaisir, évidemment, je serais ravi de…
- Tais toi, soldat.”
Voukol m’avait coupé en un instant. Le silence s’installa, nos regards se croisèrent. Un défi. Bordel. Je détestais ça. J’ai attendu, j’ai laissé le silence se briser :
“S’il est d’accord, tu ne peux l’en empêcher, Voukol… Un si délicieux supplice de l’araignée.
- Et je le suis, répondis-je du tac au tac, autant pour essayer de m’approcher de la sorcière que pour faire enrager le sergent qui, immédiatement, fit résonner sa voix grave :
“Il suffit ! L’accord est clair : Tu ne peux t’en prendre à un arolavien. Toi, soldat, plus un mot avant que je ne te dise de parler !
- Mais…
- J’ai dit silence !”
Les conversations se poursuivirent alors, tandis que je ne disais plus un mot. Je ne compris pas tout de ce qui s’échangea. Voukol avait demandé le secours de la guenaude qui lui promit ses forces gobelines en échange d’un service. Quel service ? Simple. Se débarasser de créatures que le chancre aurait souillé. Le chancre. Rien que ça. Bordel. Voukol accepta, évidemment, tandis que dans mon coin je… quoi ? Boudais ? Peut-être. Je réfléchissais. Je voulais cette connaissance, je voulais ce pouvoir savoir. Quand Voukol se leva, je le suivi, non sans croiser ce regard pénétrant que dardait sur moi la sorcière et qui, au fond de moi, faisait naitre mille sensations et émotions étranges.
Voukol marcha d’un bon pas, s’éloignant, accompagné par une bande de gobelins que Vasheska nous avait confié pour mener à bien notre mission. Il se dirigeait au nord de la maisonnée d’un pas brusque. J’ai essayé de le rattraper, de parler avec lui :
“Voukol, attendez. Attendez. On ne peut partir comme ça, laissez moi vous expliquer. Cette femme a tant de connaissances, de choses à m’apprendre, à nous apporter...
- Tais toi.
- Voukol, écoutez moi.
- C’est bien trop dangereux ! Tu ne sais pas dans quoi tu t’engages, tu ne sais pas dans quoi tu pourrais mettre les pieds.
- Ca n’a pas d’importance, ce qui est important c’est ce que l’on pourrait faire avec ces connaissances ! Le pouvoir qui en décou…
- SUFFIT ! Serais-tu prêt à mettre l’Arolavie en danger, pour ces connaissances ?
- Evidemm... “
Le mot était sorti de mes lèvres avant que je n’aie le temps de le retenir. Je vis passer dans les yeux de Voukoll tout l’orage de la haine qu’il me portait, les éclairs de sa colère envers ma soif de connaissance et mon si petit intérêt pour le bien commun du peuple que j’étais sensé protéger. Pour l'inexistence de ma loyauté envers la garde lunaire. Ce regard et les paroles qui suivirent, eurent à mon effet l’équivalent d’une lame, s’appuyant sur ma gorge. Suffisamment pour que la douleur soit presque réelle.
“Sache que chaque seconde que tu passes à respirer depuis que nous sommes entrés dans ce marais est une seconde que je t’accorde. Sache qu’à chaque seconde, je me pose la question de savoir si oui ou non, je te menotte avec ces chaines de Xonim. Que jamais cette décision n’est arrêtée et qu’à chaque instant, je peux revenir dessus. Tu arrives en dernier dans la liste des personnes et choses qui importent à mes yeux alors que l’Arolavie y arrive en premier. Sache où est ta place, reste-y et n’essaie jamais de faire passer ta petite quête de pouvoir personnelle avant le pays que tu dois protéger ou je saurais t’en trouver une que tu ne quitteras jamais.”
Sous les rires impertinents des gobelins puants, la discussion se termina en un status quo fragile. Je n’étais pas prêt de laisser tomber, mais la tirade du sergent et son oeil assassin m’avaient en cet instant refroidi suffisamment pour que j'accepte de me taire.
Aleksandr Novgarad - Mage de guerre - Lv4
PV :35/35 - CA : 14
Sorts :
1 4/4
2 3/3
Trait de feu +5 (1d10 feu)
Poigne foudroyante +5 (1d8 Foudre) - Supprime la réaction