par Etmer_Fachronies »
30 oct. 2017, 18:17
Des boyaux étroits et étouffants, prêt à vous écraser sous leur poids. Une lumière chiche, timidement apportée par quelques lampes vacillantes tremblant à chaque pas. Autour d’eux, une roche sombre et rugueuse, aux crocs déchirant sol et plafond. Devant et derrière, une obscurité compacte et absolue, presque tangible. Partout, une humidité lourde, aux relents âcres de moisi et d’humus… Aucun doute, le groupe était de retour dans l’enfer obscur de l’Inframonde.
L’humeur peu affectée par les tunnels, Yardan suivait en silence la procession, muré dans ses pensées. Un jeton de bois sec à l’effigie de Draaz dans le creux de sa paume, l’adepte du Geste songeait aux enseignements de Draaz, et tentait de jauger la situation présente à la lumière de Sa sagesse.
Par moment, l’image de Ludmilla partie plus tôt sur la carriole de Gaspardin venait s’imposer dans les pensées de Yardan, avec une insistance qui le surprenait lui-même. Qu’il soit attentif à la jeune femme était une chose, qu’elle en vienne à bousculer sa réflexion sur les Dires du Dieu-Dragon en était une autre. Une fois encore, l’évidence s’imposait d’elle-même, il lui restait encore beaucoup à maîtriser pour s’estimer digne de l’Envol. Calquant ses pas à ceux de ses compagnons, le moine suivait, et réfléchissait.
Pour autant, la réalité du Monde Souterrain n’était pas à négliger. Les sens aux aguets, Yardan scrutait par moment les ombres et tendait l’oreille, attentif aux bruits peu familiers. Après tout, le Serpent n’avait été chassé que depuis peu. Des horreurs rôdaient peut-être encore, tapies dans les ombres, n’attendant qu’un écart pour frapper. Heureusement, l’endroit lui semblait plus familier qu’auparavant. Si la nuit au grand air avait été une coupure bénéfique, les habitudes prises ces derniers jours restaient encore vives.
Arrivé devant la grille fermée, Yardan se contenta d’écouter les ordres de Voukoll. Lorsque le sergent l’envoya seconder Caliobé dans son rôle d’éclaireuse, il acquiesça stoïquement, prêt à affronter ce que l’Epreuve du Jour lui réservait. Déterminé, il s’en fut dans les pas de la sorcière, l’esprit clair et le corps souple.
Oui, le moine était prêt. Lorsqu’ils rampèrent dans la pénombre, puis lorsqu’ils émergeant devant le réservoir d’eau, l’adepte de Draaz avait les muscles prêts à l’action. A tout instant, il s’attendait à une confrontation. Terrasser des abominations rescapées du temple, débusquer des esclavagistes retors, neutraliser des mineurs soumis, tout était possible ! Qu’ils viennent donc ! Il était prêt, d’esprit et de corps. En cette antique demeure naine bafouée, le courroux de Draaz allait s’abattre !
Puis vint l’épreuve de la paroi, et le corps bouillant d’une demi-elfe collé contre le sien. Avec stupeur, Yardan réalisa que son premier adversaire aujourd’hui n’était pas un monstre hideux, mais bien une brune envoutante, dont le parfum bien trop prononcé menaçait la sérénité de l’âme.
- Tu maîtrises des tas de techniques de corps à corps, c'est bien ça, questionna Caliobé ? Mais je vais t'en montrer une, tu vas t'en souvenir.
L’espace d’un instant, dans ce réduit obscur, l’esprit du moine alla ricocher sur des passes alternatives enseignées aux novices pour les enchainements du Premier Mouvement. Puis Caliobé se colla encore plus à lui, et Yardan douta de la pertinence de son idée.
Il était désarçonné, ne savait comment réagir. Sa surprise devant une telle hardiesse elfique n’était talonnée que par la vitesse à laquelle les commandements du Dieu-Dragon défilaient dans son esprit. Les frottements répétés de la brune attisaient une part de son âme depuis longtemps en sommeil, qui se réveillait brutalement. Jamais il ne se serait attendu à devoir affronter ainsi des formes brulantes maniées par une elfe experte en ces souterrains glacés. Pourtant, tel était son Epreuve en cet instant.
Pour un disciple du Commencement, les arts du corps n’étaient pas tabous, mais ils n’en restaient pas moins réservés à une branche d’étude marginale. Et c’était d’autant plus vrai pour Yardan, qui avait suivi une logique d’isolement et de rigueur particulière au sein même de sa propre communauté.
Tentant tant bien que mal de surnager dans les brumes de son hébétude, le moine parvint à s’accrocher aux mots que ses oreilles parvenaient à filtrer. Il était question de monter la paroi, d’escalade et de pallier à franchir. Oui. Un objectif. Une mission. Yardan s’accrocha à son crédo, comme un naufragé à une planche providentielle.
- La dernière étape, continuait la demi-elfe, c'est une nouvelle impulsion combinée pour que j'agrippe le rebord du conduit et que je me hisse. Arrivée là-haut, tu m'enverras une corde sachant que je ne porterai rien sur moi pour nous faciliter la tâche.
Yardan se contorsionna pour échapper à l’étreinte envoutante de la brune, et répondit d’une voix qu’il espérait égale :
- Monter… oui, c’est d’importante capitale que de grimper, pour l’aller et le retour. La Balance m’assiste, gravir obstacle est étape nécessaire pour la complétude de notre mission.
Il reprit contenance à mesure qu’il parlait. Au prix d’un mouvement de bassin, il parvint à se dégager, puis récita mentalement d’une traite un passage du Sutra des Cinq Vertus. Il poursuivit :
- C’est là chose bonne que de laisser ton sac en bas, manœuvre te sera plus aisée. Procède donc, et je ferai ce qui s’impose en cette heure. Exploration se doit d’être complète, car tel incombe à ceux dont rôle est exigé.
Les Aigles d'Arolavie : Yardan, adepte du Dieu-Dragon - Moine de niveau
6
CA
15 - PV
45/45 (6d8) - DV
6/6 (d8+2) - Points Ki
6/6 - Héroïsme
3/3 - Gourde
10/10